Madame la ministre,
La crise sanitaire à laquelle nous faisons face depuis un an vient aggraver les difficultés de fonctionnement des établissements dont le sous-investissement est chronique depuis des années.
Comme nous le rappelions dans un de nos articles daté du 20/08/2020, la rentrée universitaire de 2019 voyait déjà 200 000 étudiants inscrits de plus qu’en 2007, faisant passer notre taux d’encadrement de 15 à 17 étudiants/enseignants, lorsqu’il est aujourd’hui à 11 en Allemagne et que la moyenne des pays de l’OCDE est à 15. Sur cette période d’une douzaine d’années, le déficit d’agents est donc de 14 000 personnels enseignants et 14 000 personnels BIATSS. Dans ce contexte déjà très difficile, les universités ont vu à la rentrée 2020, plus de 50 000 étudiants supplémentaires s’inscrire et une crise sanitaire perdurer.
Dans ce contexte, les personnels de l’ESR dans leur ensemble ont réussi à mettre en œuvre, en un temps record et au prix d’un travail colossal, des solutions pour assurer leurs cours, leurs TD et leurs TP en présentiel lorsque c’était possible, en hybride ou totalement à distance. Par ailleurs, des solutions ont été trouvées pour les étudiants en rupture numérique et des aides ont pu être apportées par les établissements aux étudiants les plus fragiles sur le plan matériel et psychologique.
Cependant, les personnels ne peuvent plus, seuls, compenser et pallier les effets délétères de la crise sanitaire et du manque d’investissement de l’État. Pour le SNPTES, il n’y a plus de marge de manœuvre et les personnels sont épuisés. Chez les étudiants la situation est également dramatique. Certains ont d’ores et déjà décroché psychologiquement ou par manque de financement de leurs études. En effet, de nombreux étudiants ont perdu leur petit job ou alors leurs familles se retrouvent dans l’incapacité d’assurer le financement de leurs études. Par ailleurs, le SNPTES rappelle que les personnels restent exposés à de nombreux risques, y compris lorsqu’ils télétravaillent. Ainsi, la formation et l’accompagnement humain, les outils et matériels mis à disposition des personnels participent à la prévention de l’apparition de troubles musculosquelettiques, qui représentent actuellement 75% des maladies professionnelles dans l’enseignement supérieur et la recherche. Pourtant, et malgré ce premier mois de l’année 2021 qui a été à l’image de ce que nous vivons toutes et tous depuis bientôt un an, mettant à l’épreuve nos certitudes, nos habitudes et nos repères, le SNPTES tient à rappeler l’implication sans faille des agents de nos ministères qui ont su s’adapter, et participer à l’effort collectif. Malgré l’épuisement, l’usure parfois, les personnels continuent à faire front, ensemble. Il est vrai que ces derniers jours, nous nous retrouvons encore une fois dans l’attente, oscillant entre les annonces du retour en présentiel pour l’ensemble des étudiants d’ici le 8 février au plus tard et selon une jauge de 20% des effectifs, et celles d’un possible reconfinement.
Madame la ministre, le SNPTES ne peut donc que constater que l’enseignement supérieur, et plus particulièrement les universités sont au pied du mur. La France doit faire face et ne plus se soustraire à l’investissement, politique et de moyens, nécessaires à l’instruction de ses citoyennes et citoyens. Cet investissement est vital si la France veut pouvoir limiter les conséquences de la crise économique qui s’annonce. Par ailleurs, cette crise nous a appris que nous n’étions collectivement pas préparés à affronter une telle épreuve et l’anticipation aura fait défaut tout au long de l’année écoulée.
Ainsi, et outre un investissement massif vital, il est donc indispensable, pour le SNPTES, que les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche réfléchissent et débattent dès maintenant, de ce que sera l’après crise. Comme à son habitude, le SNPTES entend bien jouer son rôle et être force de proposition. Le SNPTES a fait parvenir au président de la république, au premier ministre et à vous même madame la ministre, ses propositions de mesures à mettre en œuvre pour les étudiants après la crise sanitaire déclinées autour de 10 axes :
- mesures économiques et sociales ;
- compléments et consolidation de la formation initiale ;
- renforcement de la formation tout au long de la vie ;
- validation de compétences à l’aide de stages ou de projets : Faire de la crise une opportunité de changements structurels ;
- remettre la pédagogie au cœur des missions ;
- travailler sur le bienêtre des étudiants ;
- faire de la crise une opportunité pour repenser l’enseignement supérieur et la recherche ;
- remettre l’université et la recherche au cœur de notre société ;
- construire une plateforme d’éducation européenne gratuite et ouverte à tous ;
- préparer le futur et anticiper les crises.
Pour mettre en place toutes ces mesures et ramener le taux d’encadrement des étudiants au moins au taux moyen des pays de l’OCDE, le SNPTES appelle de ses vœux une loi de programmation de l’enseignement supérieur complétant la loi de programmation de la recherche.
Cette LPR, le SNPTES l’a accueillie favorablement et a voté « POUR » sans ambiguïté dans les différentes instances. Bien sûr, nous ne pensons pas que cette loi soit parfaite, et nous restons opposés aux chaires de professeurs juniors et aux CDI de mission, mais cet investissement massif reste à saluer. Par ailleurs, le SNPTES se satisfait que la ministre, son cabinet et ses services aient ouvert de réelles négociations qui ont abouti à la signature du protocole d’accord relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche. Malheureusement, ce comité tarde à se mettre en place, et le SNPTES est impatient de reprendre les négociations, car il reste selon nous, un certain nombre de points à arbitrer.
Le SNPTES est donc prêt à travailler et à faire une nouvelle fois la démonstration de l’utilité d’un réel dialogue social. Au gouvernement de donner les preuves qu’il est lui aussi dans cet état d’esprit et qu’il est prêt au compromis.